Le féminisme en série

Le masculin l’emporte sur le féminin. C’est une règle de grammaire qui nous est enseignée dès le CP et qui témoigne du patriarcat ancré dans notre société.

Longtemps privées de leurs droits même les plus élémentaires, les femmes se battent depuis des siècles pour être mieux traitées. Considérées comme inférieures, elles sont invisibles dans nos manuels d’Histoire, à quelques exceptions près. L’ensemble de ces combats prônant l’égalité homme- femme s’est inscrit dans l’Histoire jusqu’à former un mouvement que l’on appelle le féminisme. La Révolution française entraine une première remise en cause de la question de l’égalité des droits entre les hommes et les femmes. A l’heure où l’universalisme est revendiqué haut et fort, cette quête d’émancipation féminine ne portera pourtant pas ses fruits, les femmes n’étant pas considérées citoyennes au même titre que les hommes. Bien qu’un ensemble d’actions soit mené pour obtenir l’égalité entre les hommes et les femmes les années qui suivent, il faudra attendre la première vague féministe pour que les choses commencent à se décanter. Cette première période est marquée par l’apparition du terme « féminisme » et la lutte pour la reconnaissance des droits civiques des femmes qui permet d’obtenir le droit de vote en 1918 en Angleterre. Accéder au vote, c’est avoir la possibilité d’acquérir d’autres droits. Les femmes vont profiter de ce nouveau bénéfice pour se libérer de l’oppression patriarcale lors de la deuxième vague féministe, en commençant à travailler mais surtout en obtenant la légalisation de l’avortement et celle de la contraception. La troisième vague quant à elle se consacre à la lutte pour les libertés et notamment pour les minorités. Depuis les années 2000, le combat est à la dénonciation des violences faites aux femmes et les réseaux sociaux permettent d’agir à grande échelle. À travers ces périodes, l’image de la femme dans la société évolue, et ces changements sont observables sur le petit écran. De la ménagère qui obéit à son mari au doigt et à l’œil, à la femme qui gagne en indépendance, en passant par la femme sexualisée jusqu’à la femme libre, les personnages féminins des séries ont progressé avec les mutations sociales. En effet, nous avons pu nous rendre compte que les séries sont le reflet de la société, mais aussi qu’à l’inverse elles permettent de donner de la visibilité à certains sujets et de faire changer les mentalités. En somme, elles se nourrissent mutuellement. Mais si aujourd’hui, les séries mettent aisément en scène des protagonistes féminins et abordent la sexualité féminine sans problème, même les plus progressistes ont tendance à perpétuer des stéréotypes et à invisibiliser certaines minorités. Ces faiblesses représentent les enjeux de la série féministe de demain, l’objectif étant que tout le monde puisse se reconnaitre à un moment du récit.

Le changement commence derrière la caméra par une meilleure représentation des réalisatrices de séries. Ces dernières sont encore trop peu présentes alors que leur point de vue féminin apporte une tout autre dimension au récit. Aussi, la communauté LGBT+, les personnes non- binaires, les seniors, les obèses et les femmes victimes de violence méritent d’être rendues visibles au même titre que le reste de la société. Au-delà de rendre apparent l’ensemble de ces personnes, nous pouvons attendre de la série féministe de demain qu’elle aborde certaines thématiques encore passées sous silence. Au niveau de la sexualité, il serait important de parler de dépistage, de montrer des personnages qui mettent des préservatifs ou encore que le sexe ne se réduit pas à la pénétration. Dans le même registre, le concept de period sex ou sexe pendant les règles, voire les règles de manière générale sont également des réalités qui doivent être montrées au petit écran. En termes de violences sexuelles, l’inceste père-fille est le moins représenté alors qu’il est le plus courant. Enfin, les acteurs trans devraient obtenir le droit de jouer des rôles cisgenres puisque la situation inverse est autorisée. Finalement, nous n’attendons plus de la série féministe de demain qu’elle se diversifie, mais qu’elle soit authentique.

Après avoir étudié les rouages du féminisme au sein du petit écran, nous avons toutes les cartes en main pour réaliser la série la plus inclusive possible. Il serait donc intéressant d’envisager le scénario féministe de demain, mais aussi un format qui impliquerait directement le spectateur de manière à ce que la société influence progressivement l’histoire.

Partager l’article sur :

Cet article a été écrit par :