L’engagement à travers le design graphique
Á l’origine de ce mémoire vient une constatation vis-à-vis du domaine du graphisme aujourd’hui : une grande majorité des débouchés sont dans des agences de publicité ou de communication, utilisant le graphisme comme moyen d’embellir et de faire vendre des produits ou services, quels qu’ils soient. En tant que graphiste ou en direction artistique, nous répondons à ces demandes sans prendre en compte l’éthique des projets, personnes ou entreprises pour lesquelles nous travaillons. Loin d’être un reproche, c’est la manière dont ce travail fonctionne. C’est cette constatation qui m’a poussée à chercher d’autres manières d’utiliser le graphisme, d’autant plus que dans une société régie par l‘image il me semble important de porter un regard critique sur ce que l’on crée et sur son influence.
Comment s’engager au travers du graphisme ?
Le graphisme en tant que discipline à part entière voit le jour dans le courant du XXème siècle bien que ses origines remontent à la naissance de l’impression. Sa fonction première est de rendre compréhensible visuellement des informations. Il va surtout être utilisé dans les domaines de la publicité et de l’édition, mais en même temps d’autres groupes de personnes s’en emparent pour faire passer des messages engagés aux services de causes. Ce graphisme engagé prendra d’abord la forme d’affiches aux visuels impactant, dont certains sont devenus célèbres comme les affiches de mai 68. L’affiche était le support unique, mais aujourd’hui avec le numérique il y a une multitude de médiums à disposition pour diffuser ses messages et expérimenter. Le graphisme engagé passe aussi par la création d’identités visuelles de mouvements militants, pour être reconnaissables par des couleurs, des formes, etc. Le graphisme au service du militantisme montre qu’il peut aller au-delà de son “usage marchand” pour avoir un “usage politique” dans le sens vivre ensemble.
Bien que l’intention soit primordiale dans le graphisme engagé, la forme n’en est pas moins intéressante. Libéré de contraintes commerciales, ce type de graphisme se montre très créatif voire parfois excentrique. Même si il est moins étudié et vu, il peut être une réelle source d’inspiration, n’hésitant pas à s’affranchir des codes graphiques.
L’altergraphisme
S’engager graphiquement, ce n’est pas que réaliser des visuels militants, c’est aussi être dans la recherche de nouveaux usages pour le graphisme. Bon nombre de graphistes souhaitant mêler leurs convictions personnelles et leur savoir-faire se sont monté en collectif pour effectuer cette recherche et mener un travail hors-marketing. Il s’agit par exemple de créer des supports pédagogiques, de rendre accessible visuellement des informations et des concepts (signalétique, facilitation graphique), des travaux à visée sociale …
Ce sont ces pratiques, ces altergraphismes, qui sortent des objectifs mercantiles et promotionnels, qui peuvent se lier à des enjeux sociaux et politiques. En dehors de ces circuits classiques, il est possible d’avoir des questionnements éthiques sur le domaine pour ensuite expérimenter et donc renouveler la pratique graphique, d’où l’importance de valoriser ces créations engagées.